Coming out
Texte : Gabi
Illustration : Mr Tran
Je ne sais pas qui a mis ce sujet sur la table mais bon, ça devait arriver un jour. En ces temps de libération de la parole, chez les femmes harcelées, les profs dépassés, etc… voici venu pour moi le moment de me soulager d’un fardeau que je porte depuis trop d’années. Je vais enfin arrêter de mentir, ne plus faire semblant, pouvoir être qui je suis, sans peur d’être démasquée un jour que je n’aurai pas choisi.
J’espère que je ne ferai de peine à personne, surtout pas à ceux que j’aime, que personne ne culpabilisera du genre « Est-ce que c’est notre faute ? Mais qu’est-ce qu’on a fait ? Pourquoi on n’a rien vu ?». Personne n’y est pour rien, je suis faite comme ça et je ne demande qu’à être acceptée telle que je suis : je suis saxophobe.
La première fois que je m’en suis rendue compte, c’était au tout début des années 80, en écoutant un disque de Grover Washington Jr. Déjà en voyant la couverture, un saxophone dont les reflets dorés se mêlaient à ceux d’un verre de vin blanc, je ressenti comme une sorte de nausée. Mais dès que j’entendis le solo de saxo, j’eus tout à coup cette affreuse impression que l’on m’enrobait le corps et le cerveau d’une substance collante comme de la barbe à papa, et dans un mouvement de panique je me mis à hurler : « Pitié ! Arrêtez la musique ! ». Devant les têtes médusées des personnes qui étaient présentes ce jour-là, je compris que j’avais quelque chose d’anormal et prétextais une otite mal soignée.
Puis cette saxophobie s’étant ensuite confirmée à plusieurs reprises, me causant beaucoup de gêne dans les soirées entre amis, j’ai décidé de consulter un éminent saxologue. Diagnostic : je souffrais d’une forme aigue de la maladie de Sax. On m’a alors prescrit du Madness, les Blues Brothers ou encore Stan Getz. J’avoue que ces musiciens ont réussi à me procurer beaucoup de plaisir saxuel, mais la plupart des saxophonistes au mieux me laisse de marbre, au pire viole littéralement mes oreilles non consentantes.
Alors oui, aujourd’hui j’assume et je le dis bien haut : je n’aime pas le saxophone, c’est un des instruments que j’aime le moins. Moi j’aime les cuivres, les vrais, avec une préférence pour la trompette au son simple et clair. Voilà, ça m’a fait du bien de vous dire tout ça, merci de votre compréhension.
Wouaouh quel courage ! ça va mieux en le disant, mais que ça a du être dur… Allez, c’est bon. On t’accepte comme t’es…
merci, tu es d’une tolérance sans limite, mais je sais que tout le monde n’aura pas ta grandeur d’âme et je m’attend à toute sorte d’acte saxophobophobes …