La grenouille et les vacances
Texte : V!
Illustration : 537718
Salut ! Je m’appelle Danièle, pourquoi Danièle ? Une de leurs amies a, a priori, les mêmes yeux globuleux que moi ; alors j’ai hérité de son prénom. Ils m’estiment beaucoup dans la famille.
Je suis sage dans mon aquarium, placé sur le plan de travail de la cuisine. Je suis de couleur jaune vomi, je me marie bien avec le décor de la maison. Les grands me soignent et les plus petits des humains me balancent des mouches vivantes que je gobe aussitôt. On s’éclate tous ensemble, nous formons une belle famille.
Jusqu’au jour où les vacances arrivent… pas de place pour moi, comme d’hab’.
Alors que la famille s’agite partout dans la maison, moi, je coasse. D’habitude, mon chant les apaise. Mais là, c’est une période où je les énerve. « Ah ouais ! Merde ! Où est-ce qu’on va pouvoir la caser, celle-là ? ». Ça fait toujours plaisir à entendre…
Je peux me retrouver chez le vieux type de model Alzheimer, qui me laisse crever de faim pendant quelques jours ou qui me donne le casse-croûte 26 fois en 1 heure. Ça me dégueulasse toute l’eau !
Une fois, j’ai atterri chez une crétine qui m’a mélangé à ses poissons. Il y en avait un qui passait son temps à me faire des suçons et les autres me reluquaient avec des yeux de merlan frit, comme si j’étais un extra-terrestre.
L’année dernière, j’ai essayé de retenir la famille de partir. Je m’étais évadée de ma cage de verre, grâce à un saut digne de Sergueï Bubka. Après, je me suis planquée sous un meuble. Là, j’aurais pu y laisser ma peau. A la vue du bocal vide, parents et enfants ont cédé à la panique, mais pas très longtemps. Le quart d’heure suivant, les recherches ont cessé et ils ont continué à faire leurs valises. Mais putain de merde ! Les vacances valent plus que ma vie ! Tous les ans je redoute l’arrivée de cette période, synonyme d’abandon et de rejet.
En plus, à leur retour, ils ne sont pas pressés de me récupérer, les « gros cons ».
V !